FORCE AND THE UNDERSTANDING

Appearance and the super sensible world

 

L’Apparition et le phénomène

L’apparition (le phénomène comme phénomène) n’est pas un phénomène

« Le phénomène comme phénomène n’est pas un phénomène »

Commentaire de Descombes (Le consensus humain…)

Commentaire de Kripke et Hume

Commentaire de Searle It’s parallelism, stupid !

L’amer Locke. L’esprit a-t-il un trou du cul ?

Kant et le phénomène

La matière et les forces ne sont pas des choses mais des abstractions

Une erreur de Pierce

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Index du site : phénomène

Indéfinition de l’économie

Qu’allait-il faire en Ethiopie ?

Critique de la raison impure

Négation de l’économie

L’enjeu de ce monde est très simple

Qui parle de se corriger ?

Réponse à la chienlit gauchiste

A Reverse Affair

Éthique à Nicomaque - Livre V

Réponse à l’auteur de « Marx envers et contre Marx »   

Le knock-blot de Mr Ripley

PARALOGISME DE L’IDÉALITÉ DU RAPPORT EXTÉRIEUR

Kritik der reinen Vernunft

 

Le 19 juin 1959, je suis parvenu à ce à quoi Husserl souhaitait ardemment « parvenir », « un fonds d’évidence absolu » (MD, Intr., p. 45, PUF) : l’apparition n’apparaît pas, l’apparition ne peut pas apparaître, l’apparition ne paraît jamais. C’est la seule certitude absolue dont il est impossible de douter. Quand vous avez saisi cela (saisi dans le monde, les idées sont saisies dans le monde. NB : la saisie d’une idée peut durer vingt ans. Elle peut aussi ne jamais aboutir) vous devenez instantanément un fanatique : vous avez une foi invincible (Husserl recherche une « foi inébranlable ») et vous défiez le monde. La foi n’est rien d’autre qu’un fonds d’évidence absolu. Amen.

Ce qui se conçoit bien s’énonce clairement et les mots pour le dire viennent facilement paraît-il. Je n’ai jamais vu énoncé plus clair : « le supra sensible est le phénomène comme phénoméne (c’est à dire l’apparition — ne pas confondre apparition et apparaissant. Apparition = phénomène en tant que phénomène ; apparaissant = phénomène) ». Quant à la facilité de la venue des mots, elle est totale, puisque ce n’est pas moi qui les ai fournis mais Hegel, mal traduit qui plus est. Plus facile, tu meurs. à ces fatigués de naissance qui me demandent ce qu’est l’esprit, je répondrai : c’est ça. L’apparition est un miracle et quiconque l’ignore est un impie, une merde, un « triste sac » plein de caca et de pipi. C’est pourquoi je comprends la colère de l’Arabe.

Ne vous méprenez pas, cependant, sur ce « vous défiez le monde ». Je ne veux pas dire que vous bombardez New York, ni même que vous y songez. Je veux dire, et je le dis donc, que vous défiez les sortilèges et les menaces du monde, ses miasmes, ses bombardements de conneries et, qui plus est (last but not least) vous devenez invisible (Ainsi, Debord ne m’a pas vu, il n’a pas vu à qui il avait à faire, il n’a pas vu que l’on ne pouvait pas m’intimider. Cet ivrogne n’a pas reconnu l’anche tu pizarre). Médicalement dit, vous êtes vacciné, vous vous mouvez librement dans les miasmes mortels (pour l’esprit).

Notamment, lorsque je commençai à lire Marx, en 1963, malgré la beauté du début du Capital (c’est aussi beau que le début de La Chartreuse de Parme), je sentis immédiatement qu’il manquait quelque chose. Marx ne parlait que d’êtres collectifs, d’individus collectifs, de collectivité sans jamais faire aucune référence à l’apparence. Évidemment, ce que je viens de dire là, je ne pouvais pas le dire alors, mais j’étais vacciné et je sus tout de suite que quelque chose n’allait pas et cela malgré tout ce que j’appris grâce à cette lecture.

L’être de l’apparition est de ne pas en avoir, ce qui nous met à l’abri de toute déception quant à cet être. Est-ce à dire qu’elle n’existe pas. Non, et Parménide sera satisfait : la première phrase du seconde livre de la Grande Logique « L’essence » n’est-elle pas : « L’essence doit nécessairement apparaître » ? L’apparition confère l’existence à l’essence. L’apparition est la mère de toutes les existences, c’est à dire, pour parler comme Husserl, la mère universelle des existences. J’abonde dans le sens de Parménide : ce qui n’existe pas, il ne faut pas en parler… sauf pour dénoncer les charlatans qui ne cessent d’en causer dans le poste. C’est la philosophie négative, la philosophie à coups de ciseaux (Husserl parle « d’évidences négatives »). Je généralise : il n’y a d’évidences apodictiques (non soumises au doute) que négatives.

Sartre a parfaitement raison : le prétendu « pur ego des cogitationes » ou « ego des pures cogitationes » est soit un objet aussi douteux que les autres, soit aucun objet, une chimère de professeur. L’objet intentionnel n’est aucun objet. Transcendantal mon cul. Transcendant, si. Transcendantal, no. Cependant, Husserl c’est du sérieux et il écrit clairement (du moins dans les Ideen et dans les Méditations), ce qui signifie que l’on peut espérer apprendre quelque chose en le lisant, notamment y déceler ces « erreurs séduisantes » qui, selon lui, ont détourné Descartes et ses successeurs du droit chemin et, finalement, Husserl lui-même. Ce n’est ni du des Rides À., ni du Là Quand, ni du Heildegger, Husserl n’est pas un faiseur. On peut lire parmi le charabia de la page 95 de La Grammatologie, (Minuit, 1967) : « La différence inouïe entre l’apparaissant et l’apparaître (entre le “monde” et le “vécu”)… ». Cette différence est effectivement inouïe, 1) d’une part parce que l’apparaissant apparaît (ce qui est la moindre des choses) tandis que l’apparaître n’apparaît pas. On ne saurait faire plus différent, n’est-ce pas ? Il s’ensuit, notamment, que l’apparaître ne saurait être “un vécu”. Ces « vécus » sont des objets comme les autres, aussi incertains, mais pas moins, que les autres. 2) D’autre part, parce qu’il me semble que personne n’a (indicatif svp) jamais entendu parler de cette différence. De toute ma vie, jamais je n’ai rencontré une personne qui en eût entendu parler et Sartre ne parvient pas à ce résultat. Une machine, jamais, n’abolira l’apparition.

17.  On est obligé d’ailleurs de confesser que la Perception et ce qui en dépend, est inexplicable par des raisons mécaniques, c’est-à-dire par les figures et par les mouvements. Et feignant qu’il y ait une Machine, dont la structure fasse penser, sentir, avoir perception ; on pourra la concevoir agrandie en conservant les mêmes proportions, en sorte qu’on y puisse entrer, comme dans un moulin. Et cela posé, on ne trouvera en la visitant au dedans, que des pièces, qui poussent les unes les autres, et jamais de quoi expliquer une perception. Ainsi c’est dans la substance simple [les monades, ne pas confondre avec les gonades], et non dans le composé, ou dans la machine qu’il la faut chercher. Aussi n’y a-t-il que cela qu’on puisse trouver dans la substance simple, c’est-à-dire, les perceptions et leurs changements. C’est en cela seul aussi que peuvent consister toutes les Actions internes des substances simples (La Monadologie, 1714)

Cette expérience de pensée conduit à l’hypothèse du parallélisme. Remarquons que lorsque Leibniz veut illustrer le parallélisme, il prend deux horloges, c’est à dire deux machines, deux mécanismes ! ce qui contredit ce qui précède : si l’on pouvait assimiler l’âme à une machine, on la verrait quand on pénètre dans le moulin. Nobody’s perfect.

 

Quel est le sujet ? Je compare ci-dessous une traduction anglaise et une traduction française d’un passage de « Force et entendement » de la Phénoménologie de l’Esprit. L’Anglais étant, par la force des choses, Saxon, comprend la grammaire allemande. Il ne traduit pas Erscheinung par phénomène.

 

147. The inner world, or supersensible beyond, has, however, come into being : it comes from the world of appearance which has mediated it ; in other words, appearance is its essence and, in fact, its filling. The supersensible is the sensuous and the perceived posited as it is in truth; but the truth of the sensuous and the perceived is to be appearance. The supersensible is therefore appearance qua appearance . We completely misunderstand this if we think that the supersensible world is therefore the sensuous world, or the world as it exists for immediate sense-certainty and perception; for the world of appearance is, on the contrary, not the world of sense-knowledge and perception as a world that positively is, but this world posited as superseded, or as in truth an inner world. It is often said that the supersensible world is not appearance; but what is here understood by appearance is not appearance, but rather the sensuous world as itself the really actuel. (fac similé)

Texte allemand

/79/ Das Innere oder das übersinnliche Jenseits ist aber entstanden, es kommt aus der Erscheinung her, und sie ist seine Vermittlung; oder die Erscheinung ist sein Wesen, und in der Tat seine Erfüllung. Das Übersinnliche ist das Sinnliche und Wahrgenommene gesetzt, wie es in Wahrheit ist; die Wahrheit des Sinnlichen und Wahrgenommenen aber ist, Erscheinung zu sein. Das Übersinnliche ist also die Erscheinung als Erscheinung. — Wenn dabei gedacht wird, das Übersinnliche sei also die sinnliche Welt, oder die Welt, wie sie für die unmittelbare sinnliche Gewißheit und Wahrnehmung ist, so ist dies ein verkehrtes Verstehen; denn die Erscheinung ist vielmehr nicht die Welt des sinnlichen Wissens und Wahrnehmens als seiende, sondern sie als aufgehobene oder in Wahrheit als innere gesetzt. Es pflegt gesagt zu werden, das Übersinnliche sei nicht die Erscheinung; dabei wird aber unter der Erscheinung nicht die Erscheinung verstanden, sondern vielmehr die sinnliche Welt, als selbst reelle Wirklichkeit. (fac-similé)

 

Traduction Hyppolite-Lefebvre
/121/ Mais l’Intérieur ou l’au-delà supra-sensible a pris naissance, il provient du phénomène, et le phénomène est sa médiation ou encore le phénomène est son essence, et en fait son remplissement. Le supra-sensible est le sensible et le perçu posés /122/ comme ils sont en vérité; mais la vérité du sensible et du perçu est d’être phénomène. Le supra-sensible est donc le phénomène comme phénomène. — Si l’on voulait entendre par là que le supra-sensible est en conséquence le monde sensible ou le monde comme il est pour la certitude sensible immédiate et pour la perception, on comprendrait à l’envers; car le phénomène n’est pas le monde du savoir sensible et de la perception comme étant, mais il est le savoir sensible et la perception posés plutôt comme dépassés et posés dans leur vérité comme intérieurs. On dit ordinairement que le supra-sensible n’est pas le phénomène, mais c’est que sous le vocable de phénomène, ce n’est pas vraiment le phénomène que l’on entend [c’est à dire au sens que Hegel lui donne plus haut], mais plutôt le monde sensible lui-même, comme réalité effective réelle.

 

 Comme vous pouvez le constater, il n’est pas du tout question de « phénomène » dans cette traduction anglaise mais d’appearance, c’est à dire… d’apparition car, en anglais appearance signifie apparition. Merde à la fin ! (Cf. la traduction de Locke par Vienne qui confirme en note : « Appearance traduit par manifestation, pour éviter la connotation du français, apparence. »)

Certes, en anglais le même mot d’appearance désigne aussi l’apparence. Mais ce n’est pas le cas en allemand , ni en français. La seule chose qui soit à peu près certaine est que Hegel n’a pas écrit ni voulu écrire apparence. Donc seule demeure la question de savoir si Hegel a voulu dire apparition ou bien phénomène puisque beaucoup de dictionnaires, qu’ils soient français, anglais ou allemands, donnent ces termes comme équivalents. Littré, lui (ni l’Académie), ne s’y trompe pas : apparition = manifestation d’un phénomène.

. Hippolyte nous dit, I, p. 68, l. 5, qu’il traduira « Erscheinung » par manifestation, ou phénomène et « Schein » par apparence. Et Hegel nous dit : « Mais la science doit se libérer de cette apparence [Schein] » Ce plaisantin nous dit ailleurs (?) « l’apparence est une chose qui n’est aucune chose ».

Dans le Langenscheidt nous trouvons : Apparence : Aussehen, Anschein, Schein (der Schein trügt, les apparences sont trompeuses), scheinbar (en apparence) et ailleurs : Erscheinungsbilde.

Cf. commentaire du lexique de Lefebvre.

Bourgeois, traducteur de l’Encyclopédie, nous dit (Note) : « “Die Erscheinung”. Nous préférons la traduction “l’apparition” à la traduction “le phénomène”, pour conserver en français le lien indiqué par l’allemand : “Schein-Erscheinung” (“apparence-apparition”), “scheinen-erscheinen” (“paraître-apparaître”), l’apparition (ou l’apparaître) étant le développement de l’apparence (ou du paraître). »

Dans le Merriam-Webster, Phénomène signifie : quelque chose qui apparaît . En grec, un phénomène signifie : un apparaissant ♠♠♠♠. Appearance signifie : l’acte, le processus, l’action d’apparaître, l’acte de devenir visible, autrement dit apparition  ♠♠♠ (mais aussi « a sense impression or aspect of a thing » c’est à dire apparence ♠♠♠♠♠).

Donc, si Hegel avait voulu dire « un apparaissant », « quelque chose qui apparaît », un phénomène, il aurait pu employer le terme « Phänomen », ce qu’il n’a pas fait.

Hegel n’a jamais employé, dans la Phénoménologie, le terme « phänomen » comme permet de le constater une recherche électronique , sinon dans le titre. Et pourquoi seulement dans le titre ? Parce que Hegel voulait comme titre : « Étude de l’apparition de l’esprit ». « -logie » étant un suffixe grec, il était tenu d’employer « Phänomen » comme racine, il ne pouvait écrire par exemple : « Apparitiologie ».

Mais, Appearance signifie aussi : le monde des phénomènes sensibles ♠♠. Donc, Hegel a-t-il voulu dire « le monde des phénomène sensible » ? Surtout pas, absolument pas, car, à peine a-t-il fini de tracer sa phrase magique qu’il précise, derrière un tiret : « Si l’on voulait entendre par là que le supra-sensible est en conséquence le monde sensible (…) on comprendrait à l’envers. » Étant donné qu’à son époque, comme en témoigne cette encyclopédie allemande de 1783 (deux ans après la parution de la première Cripure de la raison tique), on emploie indifféremment Erscheinung et Phänomen en allemand, Hegel prend bien soin d’indiquer que par apparition on entend à tort phénomène, apparaissant, monde sensible. On ne saurait être plus clair ! C’est bien parce qu’il y a une ambiguïté dont Hegel est parfaitement conscient qu’il nous met en garde.

Mon cher Watson, Hegel lui-même nous apporte la preuve que nous cherchions : avec la traduction Erscheinung = phénomène d’Hyppolite et de Lefebvre, sa mise en garde est incompréhensible : quel est donc ce phénomène qui n’est pas le vrai phénomène ? Tandis que nous comprenons tout de suite qu’il s’agit de la confusion apparition = phénomène si l’on traduit Erscheinung par apparition : la vraie apparition n’est pas un phénomène et, qui plus est, selon Hegel, elle est la vérité du phénomène, vérité qui est… d’apparaître (Cf. infra).

Donc, si ce n’est pas phénomène, que Hegel veut dire, c’est donc qu’il dit apparition.

Ensuite, une autre preuve se manifeste maintenant. Un passage obscur (quel passage n’est pas obscur chez Hegel) s’éclaire : « la vérité du sensible et du perçu est d’être phénomène » (traduction Hyppolite) devient : « la vérité du sensible et du perçu est d’être apparition ». En effet, Erscheinung, si on l’entend comme phénomène, à tort selon Hegel, signifie alors monde sensible, perçu, apparaissant. Or la vérité de l’apparaissant est l’apparition. En effet, qu’est donc un apparaissant qui n’apparaîtrait jamais ou qui ne pourrait apparaître sinon un faux apparaissant. Le vrai apparaissant paraît, il y a apparition. L’apparition est la vérité de l’apparaissant. C’est l’apparition qui fait que l’apparaissant est un véritable apparaissant. Cela est parfaitement incompréhensible avec la traduction Hyppolite : comment le phénomène pourrait-il être la vérité du phénomène ?

Donc, non, Hegel n’a pas voulu dire le monde sensible, ni quelque chose qui apparaît, ni un apparaissant, ni un phénomène. Il a dit et il a voulu dire apparition. Merde à la fin ! Ensuite il s’égare un peu dans un monde supra sensible (le jeu des forces, le calme des lois, etc.) peu m’importe. L’essentiel est dit. Et Hegel lui-même ne l’a pas compris. Frege dirait qu’il n’a pas saisi l’idée qu’il pouvait saisir dans ses propres mots, en tant que partie du monde, « un trésor était caché dedans ».

Ça c’est de l’herméneutique, de l’interprétation des livres sacrés. Il faut retrouver la sainte logique qui se cache sous la grammaire profane.

Maintenant, je vais faire une petite expérience : je vais remplacer ce fichu phénomène, d’abord par « l’apparaissant », ensuite par « l’apparition ».

Mais l’Intérieur ou l’au-delà supra-sensible a pris naissance, il provient de l’apparaissant, et l’apparaissant est sa médiation ou encore l’apparaissant est son essence, et en fait son remplissement. Le supra-sensible est le sensible et le perçu posés comme ils sont en vérité; mais la vérité du sensible et du perçu est d’être un apparaissant. Le supra-sensible est donc l’apparaissant comme apparaissant . — Si l’on voulait entendre par là que le supra-sensible est en conséquence le monde sensible ou le monde comme il est pour la certitude sensible immédiate et pour la perception, on comprendrait à l’envers; car l’apparaissant n’est pas le monde du savoir sensible et de la perception comme étant, mais il est le savoir sensible et la perception posés plutôt comme dépassés et posés dans leur vérité comme intérieurs. On dit ordinairement que le supra-sensible n’est pas l’apparaissant, mais c’est que sous le vocable d’apparaissant, ce n’est pas vraiment l’apparaissant que l’on entend, mais plutôt le monde sensible lui-même, comme réalité effective réelle.

 

Mais l’Intérieur ou l’au-delà supra-sensible a pris naissance, il provient de l’apparition, et l’apparition est sa médiation ou encore l’apparition est son essence, et en fait son remplissement. Le supra-sensible est le sensible et le perçu posés comme ils sont en vérité; mais la vérité du sensible et du perçu est d’être apparition. Le supra-sensible est donc l’apparition comme apparition. — Si l’on voulait entendre par là que le supra-sensible est en conséquence le monde sensible ou le monde comme il est pour la certitude sensible immédiate et pour la perception, on comprendrait à l’envers; car l’appariton n’est pas le monde du savoir sensible et de la perception comme étant, mais il est le savoir sensible et la perception posés plutôt comme dépassés et posés dans leur vérité comme intérieurs. On dit ordinairement que le supra-sensible n’est pas l’apparition,  mais c’est que sous le vocable d’apparition, ce n’est pas vraiment l’apparition que l’on entend  {♫ Et l’on entend dans les champs, s’masturber les éléphants…}, mais plutôt le monde sensible lui-même, comme réalité effective réelle.

De tout cela j’ai conclu que l’apparition en tant qu’apparition n’apparaît pas ou si vous préférez, que l’apparition en tant qu’apparition n’est pas un apparaissant, c’est à dire n’est pas un phénomène (sans pour autant être un monde suprasensible comme le prétend Hegel).

Le nœud du problème est là : ce n’est pas vraiment l’apparition que l’on entend par apparition.

Les phénomènes ne sont pas des apparitions (contrairement à la Sainte Vierge) mais des apparaissants. L’apparition est la vérité des apparaissants. Elle est bien le suprasensible car elle n’apparaît pas. Par elle le suprasensible naît, c’est elle qui remplit le suprasensible. Elle est bien l’essence du suprasensible. Ce passage de Hegel devient parfaitement clair.

Il me reste à indiquer ce que j’ai lu trois fois avant que ça ne fasse Tilt ! : étant donné que ce chapitre III, « Force et entendement » se réfère sans cesse au troisième principe de Newton : égalité de l’action et de la réaction, j’ai pensé que Hegel entendait « phénomène » au sens de Newton, et de ce fait ce passage demeurait imbitable. Je suis persuadé d’ailleurs que c’est ainsi que Hegel, épris de science, l’entendait.

Cf. « Le phénomène comme phénomène n’est pas un phénomène » et le commentaire commenté du second traducteur Lefebvre

Merriam Webster

appearance [Merriam-Webster]

Pronunciation: \ə-’pir-ən(t)s\

Function : noun Date: 14th century

1 a : external show : semblance <although hostile, he preserved an appearance of neutrality> [apparence]

   b : outward aspect : look <had a fierce appearance> [apparence]

   c : plural : outward indication <trying to keep up appearances> [apparences]

2 a : ♠♠♠♠♠ a sense impression or aspect of a thing <the blue of distant hills is only an appearance> [apparence]

   b : ♠♠ the world of sensible phenomena

3 a : ♠♠♠ the act, action, or process of appearing [Cf. apparition [de l’Anglo-Rimbaldien apparicheune] : the act of becoming visible ; Cf. Littré]

   b : the presentation of oneself in court as a party to an action often through the representation of an attorney

4 a :  something that appears : phenomenon [la confusion apparition = phénomène dénoncée par Hegel est aussi présente en anglais]

   b : an instance of appearing : occurrence

 

phenomenon

Pronunciation: \fi-’nä-mə-ˌnän, -nən\

Function: noun

Inflected Form(s) : plural phe·nom·e·na or phe·nom·e·nons

Etymology : Late Latin phaenomenon, from Greek  phainomenon, from neuter of phainomenos, ♠♠♠♠ present participle of phainesthai to appear [c’est à dire un apparaissant], middle voice of phainein to show — more at fancy [from Englo-French fantasie, fantsy, illusion]

Date: 1605

1  plural phenomena : an observable fact or event

2  plural phenomena :

   a : an object or aspect known through the senses rather than by thought or intuition

   b : a temporal or spatiotemporal object of sensory experience as distinguished from a noumenon

   c : a fact or event of scientific interest susceptible to scientific description and explanation

3 a : a rare or significant fact or event

   b : plural phenomenons : an exceptional, unusual, or abnormal person, thing, or occurrence

Le Webster

Definition of Appearance

 

n.

1.

The act of appearing or coming into sight; the act of becoming visible to the eye; as, his sudden appearance surprised me.

 

2.

A thing seed; a phenomenon; a phase; an apparition; as, an appearance in the sky [NB : une apparition dans le ciel et non pas une apparence dans le ciel]. [la confusion dénoncée par Hegel existe aussi en anglais. On a bien : un phénomène = une apparition.]

 

3.

Personal presence; exhibition of the person; look; aspect; mien.

And now am come to see . . .
It thy
appearance answer loud report. — Milton.

 

4.

Semblance, or apparent likeness; external show. pl. Outward signs, or circumstances, fitted to make a particular impression or to determine the judgment as to the character of a person or a thing, an act or a state; as, appearances are against him.

There was upon the tabernacle, as it were, the appearance of fire. — Num. ix. 15.

For man looketh on the outward appearance. — 1 Sam. xvi. 7.

Judge not according to the appearance. — John. vii. 24.

 

5.

The act of appearing in a particular place, or in society, a company, or any proceedings; a coming before the public in a particular character; as, a person makes his appearance as an historian, an artist, or an orator.

Will he now retire,
After
appearance, and again prolong
Our expectation? — Milton.

 

6.

Probability; likelihood.

There is that which hath no appearance. — Bacon.

 

7.

(Law) The coming into court of either of the parties; the being present in court; the coming into court of a party summoned in an action, either by himself or by his attorney, expressed by a formal entry by the proper officer to that effect; the act or proceeding by which a party proceeded against places himself before the court, and submits to its jurisdiction.

To put in an appearance

to be present; to appear in person.

 

 

To save appearances

to preserve a fair outward show.

 

 

Definition of Apparition

 

n.

1.

The act of becoming visible; appearance; visibility.

The sudden apparition of the Spaniards. — Prescott.

The apparition of Lawyer Clippurse occasioned much speculation in that portion of the world. — Sir W. Scott.

 

2.

The thing appearing; a visible object; a form.

Which apparition, it seems, was you. — Tatler.

 

3.

An unexpected, wonderful, or preternatural appearance; a ghost; a specter; a phantom.

I think it is the weakness of mine eyes
That shapes this monstrous
apparition. — Shak.

 

4.

(Astron.) The first appearance of a star or other luminary after having been invisible or obscured; — opposed to occultation.

Circle of perpetual apparition. See under Circle.

 

Definition of Phenomenon

 

n.

1.

An appearance; anything visible; whatever, in matter or spirit, is apparent to, or is apprehended by, observation; as, the phenomena of heat, light, or electricity; phenomena of imagination or memory. [la confusion dénoncée par Hegel existe aussi en anglais. On a bien : un phénomène = une apparition.]

In the phenomena of the material world, and in many of the phenomena of mind. — Stewart.

 

2.

That which strikes one as strange, unusual, or unaccountable; an extraordinary or very remarkable person, thing, or occurrence; as, a musical phenomenon

Le Littré

APPARITION

(a-pa-ri-sion ; en poésie, de cinq syllabes) s. f.

 

1° Manifestation d’un phénomène . Apparition des astres, du soleil. À l’apparition de la nouvelle lune.

2° Action de se produire, arrivée, séjour. Alors notre ami fit son apparition. Sa brusque apparition les surprit. Il ne fit là qu’une courte apparition.

D’Effiat ne venait presque jamais à la cour, et encore en apparition, SAINT-SIMON, 393, 86.

3° Fig. Naissance, commencement. Le tribunat, dont l’apparition eut lieu au milieu des guerres civiles. Dès l’apparition de la maladie. Depuis l’apparition de la philosophie de Descartes.

4° Manifestation d’un objet qui se rend visible. Les apparitions des dieux. Apparition nocturne. L’apparition d’un spectre.

Au plus haut point de sa gloire, sa joie est troublée par la triste apparition de la mort, BOSSUET, Le Tellier. Tu n’y vécus pas seul ; sous des formes divines, Tes apparitions peuplèrent ce beau lieu ; Tu voyais tour à tour passer sur ces collines L’esprit de la tempête et le souffle de Dieu, LAMART. Harm. I, 11. Ces apparitions sont comme les images.... TRISTAN, Mariane, I, 2.

5° Spectre, vision, fantôme. Il y a dans les campagnes bien des gens qui croient encore aux apparitions.

XVe s. Et mesmes, pour plus grant apparucion montrer, le Dauffin mist hors ceux qui lui avoient donné ce conseil, FENIN1419.

XVIe s. Le dit cabinet semblera estre tout d’une piece, parce qu’il n’y aura aucune apparition [apparence] de jointures, PALISSY60. Ceste apparition miraculeuse.... AMYOT, Timol. 11.

Apparitio, de apparere (voy. APPAROIR). On a dit aussi apparution, qui est tombé en désuétude.

L’apparition est un cas particulier de manifestation, la manifestation d’un phénomène. Il s’ensuit que l’expression « manifestation phénoménale » est correcte : c’est la manifestation d’un phénomène ; mais l’expression « apparition phénoménale » est un  non sens puisque apparition est manifestation d’un phénomène. On dit, sans le savoir : « manifestation phénoménale phénoménale ». Il y bien un sens, mais en jouant sur les mots : « manifestation phénoménale extraordinaire ». Cela dit, comment peut-on traduire « manifestation d’un phénomène » par « phénomène » ? C’est osé. Comment voulez-vous dans ces conditions que l’on y comprenne quelque chose ? Quand vous avez des problèmes avec une traduction de l’allemand en français, consultez une traduction anglaise (Cf. cet exemple édifiant : Traduttore, traditore). Les anglo sont saxons. Ils comprennent la grammaire allemande. Je vois, dans le dictionnaire des frères Grimm qu’Erscheinung aussi est un cas particulier de manifestation.

Encylopédie allemande de 1783

III

 

Deutsche Encyclopädie

oder

Allgemeines Real-Wörterbuch

aller Künste

Und Wissenchaften

_______

 

Frankfurt am Mayn

Den Varrentrapp Sohn und Wenner

M DCC LXX VIII – M DCCC VII

 

Achter Band

Ei – Erz

M DCC LXXX III

 

[795] APPARITION, PHÉNOMÈNE. Lorsque nous ne pouvons pas distinguer entre différentes choses, par exemple des petites poussières bleues et des petites poussières jaunes d’une poudre, alors l’une nous apparaît comme l’autre, la bleue cette fois-ci comme la jaune et la jaune comme la bleue. Par conséquent nous ne nous représentons pas la première telle qu’elle est réellement, et de même pas la deuxième, mais l’une comme l’autre sous une unique troisième forme, ainsi dans notre exemple le jaune non pas comme jaune, le bleu non pas comme bleu, mais l’une et l’autre d’une troisième, cette fois de la couleur verte. Les notions indistinctes sont celles que nous avons si nous ne distinguons pas la multiplicité au sein des objets (voir Begriff). Il en résulte que les notions indistinctes s’éloignent de la vraie nature des choses, auxquelles elles correspondent, de même que la vue indistincte d’un mélange pulvérulent d’une poudre bleue et d’une poudre jaune se présente à nous vert. Cette image indistincte des choses, lesquelles surgissent dans notre âme par l’intermédiaire de nos sens, dans la mesure où elles résultent de leur nature véritable, nous l’appellerons APPARITION {Erscheinungen}. Il en est ainsi de la couleur verte de la poudre dont nous venons de parler, un phénomène ou une apparition {ein Phänomen oder eine Erscheinung}.

Ainsi donc, en dehors de la représentation que nous en avons, l’apparition n’a aucune réalité. Par contre, il est en outre et autrement véridique que, sous la forme adoptée, nous percevons une forme déguisée, à cause du regard confus que nous portons sur ce qui nous paraît être, informe en fait. L’apparition diffère donc très largement de la « fable » ou d’une creuse illusion qui ne correspond à rien en dehors de nous-mêmes, et quand nous appelons quelque chose une apparition, par ex. si nous appelons le corps une apparition, nous ne disons pas que c’est une simple élucubration, qui ne correspond à rien de vrai en-dehors de nous, et quand on nomme quelque chose une apparition comme nous nommerons apparition le corps par exemple, on ne dit pas que ce n’est qu’une simple chimère, rien de réel, mais on dit, dans la mesure où nos yeux sont en mesure de s’ouvrir à cette forme, que les choses telles qu’elles sont se trouveraient en état d’être visibles, contrairement aux corps, nous ne pourrions les connaître, nous ne pourrions savoir que les choses, représentées d’une manière bien connue par tout un chacun, n’ont été vues que par des yeux recouverts d’un voile ; on dit qu’il se trouve véritablement quelque chose de réel caché derrière notre représentation, sur quoi on ne peut superposer cette représentation telle qu’elle est. L’exemple dont nous nous sommes servis jusqu’à présent témoigne même que l’apparition pourrait être le contraire de ce qui est véritablement caché sous elle. Car bleu, jaune et vert sont des choses contraires…

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[795] Erscheinung, Phänomenon. Wenn wir unterschiedene Dinge, z. B., blaue Staübchen und gelbe Staübchen eines Pulvers nicht unterscheiden können, so kommt uns eines vor wie das andere, das Blaue diesesmal wie das Gelbe und das Gelbe wie das Blaue. Folglich stellen wir uns das erste nicht vor, wie es wirklich ist, und das zweite gleichfalls nicht, sondern eins wie das andre unter einerlei dritter Gestalt, also in unserm Beispiele das Gelbe nicht als gelb, das blaue nicht als blau, sondern beides als von einer dritten, diesesmal der grünen Farbe. Undeutliche Begriffe sind diejenige, die wir haben, wenn wir das mannigfaltige in den Gegenständen nicht von einander unterscheiden. (s. Begriff) Undeutliche Begriffe weichen daher von der wahren Beschaffenheit der Dinge, denen sie entsprechen, ab, so wie der undeutliche Anblick eines aus blauen und gelben Puder vermischten Pulvers es als grün vorstellet. Diese von den Sinnen in unserer Seele hervorgebrachte undeutliche Abbildung der Dinge, so ferne sie von deren wahrhaften Beschaffenheit abgehen, werden Erscheinungen gennent. Solcher [796] gestalt ist die grüne Farbe des Pulvers, wovon bis her die Rede war, ein Phänomen oder eine Erscheinung.

Die Erscheinung also hat blos in unserer Vorstellung ausser derselben keine Wirklichkeit. Hingegen ist ausser und anders wahrhaftig da, das aber unter der Gestalt die es hat, wahrgenommen, sondern durch den verwirrten Anblick in das, was nicht da ist, nur da zu sein scheinet, ungeformet, also unter verstellter Gestalt wahrgenommen wird. Die Erscheinung ist daher von Ehimäre oder der leeren Einbildung sehr weit unterschieden, als welcher nichts ausser uns entspricht, und wenn man etwas eine Erscheinung nennt wie wir unter z. B. den Körper eine Erscheinung nennen werden, so sagt man nicht, daß es ein bloses Hirngespinst, nichts wirkliches seie, sondern man sagt, wenn uns die Augen dergestalt geöffnet werden können, das wie die Sachen so wie sie sind, zu sehen in den Stand kömmen, so würden wir sie z. G. die Körper gar nicht kennen, nicht wissen, das sie Dinge sind, die uns unsre, wenn ich so sprechen darf, mit einem Flor überzogene Augen bisher auf die jedermann bekannte Weise vorgestellt ; man sagt, es liege wirklich etwas reeles unter unsrer Vorstellung verborgen, auf welches aber diese Vorstellung so, wie sie ist, nicht passe, wer hingegen die confuse Vorstellung aufzulöfen oder das in derselben verworrene zu unterscheiden wisse, der habe den Gedanken der auf die Sache, wirklich passet. Das Exempel dessen wir uns bisher bedienet, bezeugt sogar, das die Erscheinung dem darunter wahrhaftig verbogenen conträr sein könne. Denn blaues, gelbes und grünes sind conträre Dinge.

Dé-gothisation et traduction : Karl von N.

(fac similé)

Fac-similés

System der Wissenschaft: Erster Theil, die Phänomenologie des Geistes

De Georg Wilhelm Friedrich Hegel

Publié par J.A. Goebhardt, 1807

Copie de l’exemplaire Université d’Oxford

Numérisé le 15 juin 2007

765 pages

 

 

Phenomenology of Spirit

De Georg Wilhelm Friedrich Hegel

Traduit par A. V. Miller

Publié par Motilal Banarsidass Publ., 1998

ISBN 8120814738, 9788120814738

595 pages

 

 

M. Ripley s’amuse